M. Carlo Di Antonio (cdH).

Pour tenir compte de la spécificité de ce type d’études, votre prédécesseur avait commandé en fin de législature une recherche sur le fonctionnement des écoles supérieures des arts organisant un enseignement relevant des domaines de la musique et du théâtre.

À l’heure actuelle, nous n’avons pas eu connaissance de ses conclusions. Monsieur le ministre, en disposez-vous ? Quelle évaluation pouvez-vous en faire ? Quel est le taux de réponse moyen ? Il semblerait que, dans certaines écoles, la publicité pour ce type d’études ait été assez réduite.

De manière générale, pouvez-vous nous indiquer quelle sera votre politique quant au nombre d’ESA et à leur place dans le mouvement de regroupement de l’enseignement supérieur. La spécificité de ce secteur fait que la sensibilité de ses responsables est un peu différente de celles des directeurs des autres écoles supérieures.

M. Jean-Claude Marcourt, vice-président et ministre de l’Enseignement supérieur.

L’étude commandée par le gouvernement précédent, sous le titre « L’enseignement supérieur des arts en Communauté française, domaines de la musique et formation de l’acteur – enquête qualitative et consultative – le regard des acteurs de terrain » a été remise à mon prédécesseur en avril 2009.

L’étude a été menée avec un objectif qualitatif et non quantitatif ; elle n’est donc pas représentative au sens statistique du terme. Elle ne mesure pas quantitativement l’ampleur des phénomènes observés. Elle ne comprend pas de raisonnements ni d’appréciations formulés en nombres et pourcentages.

L’objectif de l’étude était de comprendre les représentations mentales, les attitudes et la logique des situations vécues. La sélection des personnes interrogées a été faite dans le but d’obtenir un large éventail de profils. Dans ce cadre, 158 personnes ont été interrogées en face à face et 240 ont répondu à un questionnaire en ligne.

Il en ressort que l’approche artistique est différente selon les domaines. L’étude relève un certain nombre de tensions, voire de conflits, autour d’enjeux importants pour l’avenir des formations d’acteur et de musicien dans les écoles supérieures des arts en Communauté Wallonie-Bruxelles.

Les principales controverses identifiées portent sur les enjeux suivants : le taux d’encadrement jugé insuffisant et son mode de calcul considéré inadéquat ; les infrastructures considérées insuffisantes et ne répondant pas aux besoins de la formation des artistes ; le poids et la place jugée excessive des cours généraux ; les craintes exprimées face à la progression du modèle d’enseignement emprunté au système universitaire ou à celui des hautes écoles ; le sentiment d’une tendance à l’uniformisation des formations en inadéquation avec la singularité des études ; la faible valorisation de l’art en Communauté française ; des profils administratifs jugés inadéquats ; le sentiment partagé entre l’impératif de sélection pour maintenir le niveau élevé et un enseignement ouvert à des profils multiples d’étudiants ayant des bagages et/ou des perspectives différentes ; des difficultés subsistant pour la mise en place des projets sortant du cadre scolaire ; l’impartialité des évaluations ; le manque de liberté dans l’organisation de l’enseignement, dans la gestion des établissements et dans la mise en œuvre des projets pédagogiques.

Le rôle des délégués du gouvernement est apprécié car il clarifie et sécurise les décisions prises. Comme le gouvernement de la Communauté Wallonie-Bruxelles dont ils partagent l’opinion, les acteurs du secteur estiment que leur mission principale est de former des artistes et des pédagogues des arts compétents et de préparer les artistes à s’insérer professionnellement dans la société pour contribuer à son évolution.

Leur souhait est que rien ne puisse entraver cette mission. En outre, les acteurs des écoles supérieures des arts désirent que la logique gestionnaire soit séparée de la logique pédagogique dans les organes de gestion des écoles supérieures des arts afin que le premier aspect ne prenne pas le pas sur le second en termes de gestion du temps.

L’étude met en lumière l’idée largement répandue chez les acteurs des écoles supérieures des arts, qu’il faut être artiste pour être habilité à agir dans ce champ. Ce principe est appliqué aux enseignants, aux directions et aux décideurs. Or, toujours selon l’étude, les artistes sont peu enclins à migrer vers des fonctions qui les amènent à évoluer dans d’autres domaine que le leur.

L’étude conclut qu’il n’apparaît pas opportun d’entreprendre ou de programmer prochainement une refonte substantielle du cadre légal qui constitue le socle des études supérieures des arts. L’intégration organisationnelle des derniers décrets est en voie d’être réalisé. Des ajustements pourraient néanmoins intervenir ayant pour but le remaniement des cours généraux et l’assouplissement officiel du cursus ce qui permettrait une plus grande personnalisation des parcours et garantirait la spécificité et l’indépendance du modèle des écoles supérieures des arts vis-à-vis de l’université.

Enfin, l’étude souligne que tout le monde s’accorde à dire que l’enseignement supérieur dans les domaines de la musique, du théâtre et des arts de la parole constitue un très beau projet théorique en Communauté française. L’adhésion aux textes de référence est grande. Toutefois, la frustration de ne pouvoir les appliquer pleinement dans les faits, malgré leur bonne volonté et faute de moyens, accable de nombreux responsables.

Les étudiants constatent un fossé entre la vitrine officielle ou le programme de l’enseignement en école supérieure des arts et la réalité. Il revient à l’ensemble des acteurs, dont le parlement et le gouvernement, mais également à tous les artistes des secteurs culturel et de l’enseignement de travailler à la réduction de cette fracture. Cette étude constitue une base de documentation contribuant à une amélioration de la qualité des cursus dans les écoles supérieures des arts. Il ne faut néanmoins pas perdre de vue que cette étude a été réalisée dans deux domaines et, partiellement, dans un troisième, organisés par les écoles supérieures des arts de la Communauté française.

La publicité dont a bénéficié cette étude semble avoir été insuffisante. C’est pourquoi elle a été communiquée au début de cette année académique au Conseil supérieur de l’enseignement supérieur artistique afin que celui-ci la transmette à ses membres, c’est-à-dire à l’ensemble des écoles supérieures des arts. Dans l’enseignement supérieur artistique comme dans l’ensemble de l’enseignement supérieur, il faut renforcer la cohérence de l’offre de formation.

Afin de disposer d’une vision claire de l’avenir et d’un projet global et cohérent pour l’enseignement supérieur, une table ronde sera organisée avec les acteurs concernés. À l’issue de cette concertation, le gouvernement travaillera à un plan d’action qui devra garantir l’évolution de l’enseignement supérieur et qui impliquera tous les acteurs. Le gouvernement prendra alors les dispositions positives qui garantiront les objectifs et conditions de rapprochement. Ces dispositions préciseront la finalité, les modalités sociales, pédagogiques, financières et de gestion des rapprochements envisagés.

Aujourd’hui, nous devons travailler sur la base de cette étude avec l’ensemble des acteurs pour rechercher le moyen de garantir à chacun l’excellence de l’offre d’enseignement.

M. Carlo Di Antonio (cdH).

Même si elles sont purement qualitatives, cette études ouvre des pistes intéressantes en vue d’ajustements. Il faut lutter contre l’uniformisation dans ce secteur mais cela réclamerait un encadrement qui pourrait vite devenir pléthorique. Nous aurons l’occasion d’en reparler.